19 juillet, 2010

OGM : une position qui pour une fois n'est pas bêtement manichéenne (c'est normal, c'est la mienne).

Le débat sur les OGM est un débat intéressant parce qu'il est révélateur des fantasmes des uns et des autres. Certains voient dans les OGM la solution à tous les problèmes dans le monde, quand d'autres y voient l'instrument de l'apocalypse. Autant être clair : aucune de ces deux positions ne vaut quelque chose. La première, teintée d'un optimisme béat oublie deux choses : la plupart des OGM sont produits par des compagnies dont l'objectif n'est pas de nourrir la planète. Elles s'en foutent, j'ajouterais même qu'en examinant attentivement les parts que ces compagnies ont dans d'autres compagnies etc... on trouvera assez facilement que non seulement les Novartis et consorts se foutent comme d'une guigne de la famine dans les pays pauvres, mais qu'en plus ils font du fric avec. Alors, l'argument bisounoursien comme quoi Monsanto et al. sont là pour sauver l'Afrique de la famine est risible. Le second est scientifique : l'approche des OGM est une approche réductionniste à l'extrême. Elle pose qu'un gène suffit à modifier totalement le métabolisme d'un plante, elle méconnaît les ajustements que ladite plante peu effectuer sur son métabolisme. Comme, par exemple, de cesser d'exprimer ce gène. Or, j'ai lu quelque part que lorsqu'on arrêtait la pression de sélection (antibiotique, stress hydrique, que sais-je), certains transgènes cessaient de s'exprimer, et que cette expression n'était pas restaurée par le retour de cette pression de sélection. Par ailleurs, le transgène peut ne conférer un avantage sélectif à la plante que si cette pression de sélection est présente. Par contre, il est tout-à-fait possible que, sans pression de sélection, la plante transgénique perde un avantage sélectif. En d'autres termes, que le transgène soit toxique pour la plante. Une dissémination à grande échelle de plantes transgéniques dans l'environnement est donc peu probable. Certains pourront argumenter que la transmission horizontale d'un gène donné d'une plante vers une bactérie est possible. Et certes, ça l'est. Mais possible n'est pas probable, et la somme d'improbabilités est telle qu'en définitive, le risque est minime.

La nécessité du maintient de la pression de sélection pour obtenir une expression du transgène pose toutefois un problème que les rares anti-OGMs qui connaissent un peu le sujet ont raison de pointer : l'accumulation de substances plus ou moins toxiques dans la plante (je pense au Round Up par exemple) qui font qu'il y a accumulation de ces substances dans la pyramide alimentaire, qui, dans le monde d'aujourd'hui, est dominée par l'espèce humaine. On m'objectera que les produits sont souvent transformés, ce qui est vrai si l'on pense à la lécithine de soja par exemple. En revanche, si les plantes transgéniques ont servi à l'alimentation du bétail, ces substances s'accumulent dans la viande. Et là, cela peut poser un vrai problème de sanitaire, avec dans le pire des cas, une toxicité chronique qui se fera jour. L'agriculture moderne n'est pas étrangère à l'empoisonnement humain. Il n'est qu'à voir les dégâts qu'ont pu causer les phyto-oestrogènes autour de montpellier. Pour autant, il n'y a aucune raison de crier à l'apocalypse. Et surtout, les arguments employés par certains opposants aux OGM sont tellement ridicules que l'on se demande où s'arrête l'inquiétude légitime et où commence la manipulation.

Du côté des anti-OGMs, en effet, on observe souvent une peur panique qui n'est, la plupart du temps, gouvernée que par une seule chose : l'ignorance. Que dire en effet de ceux qui croient dur comme fer que manger des OGMs va les rendre résistants aux antibiotiques ? Que dire de ceux qui croient que les enzymes utilisées pour le clonage et qui sont retrouvées dans les sols sont là du fait des OGMs ? On peut expliquer que :
1- en général, l'être humain est résistant aux antibiotiques utilisés en clinique. C'est même pour cela qu'ils sont choisis : on essaye en général de maximiser l'index thérapeutique des drogues utilisées en clinique humaine. Le problème de la résistance se poserait aux niveaux des bactéries pathogènes, donc. Mais, là encore, c'est tellement peu probable que c'en est quasiment impossible : l'ADN qui code pour les enzymes qui inactivent les antibiotiques est, au même titre que l'ADN de la plante, digéré, tout comme les enzymes elles-mêmes le sont, à l'instar des protéines de la plante. En admettant que la quantité ingurgitée est telle que les enzymes comme les ß-lactamases pourraient en elles-mêmes avoir un effet, il faut considérer l'environnement dans lequel elles vont se retrouver, qui est extrêmement hostile à leur fonction. Un transfert horizontal du cistron à des bactéries intestinales ? Si le plasmide porteur du gène n'est pas un plasmide F ou F', je doute que cela ait lieu, et en tout les cas, je doute qu'il s'effectue dans sa totalité, ce qui rendra la protéine inopérante dans l'immense majorité des cas.
2- les enzymes utilisées pour le clonage sont issues de bactéries dont un nombre substantiel sont des bactéries du sol. Il est donc tout-à-fait normal de retrouver ces enzymes dans les sols. "Oui, mais les autres ?" Me dira-t-on. Eh bien, une protéine, à part si c'est un prion, et dans ce cas uniquement dans des conditions précises, n'a pas la capacité de se reproduire toute seule. Et d'autre part les méthodes utilisées dans le clonage aboutissent à une solution d'ADN (un plasmide) dépourvue de protéines. Ceux qui croient à cela croient à des chimères, donc.

Mais la plupart me répondront sans doute que ce sont là des arguments de défenseur des OGMs bas du front. Non. Ce sont des arguments basés sur mes connaissances de biologie moléculaire, et sur la raison, aussi. Il y a de très bons arguments pour s'opposer aux OGMs : le problème de la brevetabilité du vivant, le problème de l'usage massif de produits chimiques pour maintenir la pression de sélection dont je parlais plus haut, par exemple, le problème de la transformation des paysans en salariés de fait des semencier, mais sans avoir les avantages que pourraient conférer un statut de salarié. Je ne pense pas qu'il soit besoin, en outre, d'ajouter des arguments qui ne reposent sur rien. Surtout si ces arguments n'existent que parce que ceux qui les utilisent ne savent pas à quel point ils sont ridicules. Au passage, ces arguments, tout comme l'attitude qui consiste à balancer tout chercheur qui avance une opinion informée et surtout non manichéenne, ont plutôt pour résultat que le mouvement anti-OGM, ou au moins certaines composantes de ce mouvement, s'aliènent le soutien de chercheurs qui autrement lui seraient favorables. Et c'est dommage, il faut avouer.




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3 commentaires:

Social Waves a dit…

Bon, en tant que chercheur, je trouve que les robinets d'eau tiede devrait arreter de nous faire perdre du temps. Votre article est condescendant et irréaliste. Bon nombre d'anti-OGM sont bien plus au courant de concept générique tres innovants et savent en plus comment fonctionnent les commissions poussives de l'Afssa et quels sont les compromis complexes existants entre chercheur-experts-industriels. On a d'ailleurs vu la machine à gaz de la grippe A et les cohorte d'experts stupides reprenant en coeur la chorégraphie pandémique assez niaise...

Désolé, revenez à notre époque, les anti-OGM savent aller sur Pubmed ou dans les banques de Brevet pour trouver l'info qui déconne et dans ce cas là, les promoteurs sont le dernier souci de leur proccupation...

Berneri a dit…

Cher Yannick, si tu (vu le ton employé, ce tutoiement n'implique aucune connivence) trouve que lire ce post est une perte de temps, il me semble qu'écrire un commentaire en rajoute une couche. Avec un ton aussi péremptoire, on aurait pu s'attendre à un minimum de cohérence. Enfin.

Mon propos n'étaient pas les promoteurs, d'ailleurs, mais de démonter quelques trucs. Et surtout, comme il semble que je n'ai pas été très clair, dire qu'à mon sens, il y a des bonnes raisons économiques et politiques pour s'opposer aux OGM et que balancer des trucs apocalyptiques juste pour effrayer le chalant, je ne trouve pas ça très éthique, non plus. Après chacun fait comme il veut, un.

GFP a dit…

@ Yannick Comenge,

Désolé de vous le dire comme ça mais votre commentaire est assez creux. En dehors d´un argument d´autorité et d´une attaque ad hominem envers les experts de l´Afssa, je n´y vois pas grand chose de concret à se mettre sous la dent. Il semble que vous soyez anti-OGM et, chose rare, que ayez des arguments scientifiques à opposer "aux" OGM puisque vous faites référence à Pubmed. Quelle est donc cette "info qui déconne". Il faudrait en dire plus... argumenter en quelque sorte.